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12 septembre 2017

Être simplement soi-même

Chers lecteurs et lectrices,

J’ai eu le bonheur, hier et avant-hier, d’accueillir  mes deux filles et deux de mes petits-enfants de cinq ans et deux ans, enfants de ma « plus vieille ». En tant que grand-père qui habite loin de ses enfants, c’est une occasion spéciale de les voir chez moi deux jours de suite. Je l’apprécie d’autant plus parce que je sais par expérience combien, voyager avec des jeunes enfants, c’est beaucoup d’organisation pour la mère, considérant le transport, les vêtements, la nourriture, le coucher, etc. Ce fut donc pour moi deux jours complètement dédiés à cette visite, heureusement avec l’aide précieuse de mes deux filles : la mère et sa sœur donc la tante des tout-petits. Bien sûr, l’environnement de l’appartement avait besoin de quelques ajustements pour s’accommoder des besoins, des initiatives et de la curiosité de ces tout-petits. Tout cela m’a permis de faire de belles prises de conscience de grand-père que j’ai envie de vous partager.

J’ai réalisé que la présence de jeunes enfants chez moi ne faisait plus partie de ma vie « normale ». En tant que grand-père, les enfants sont grands, autonomes et ils habitent dans leur propre maison avec leurs enfants à eux. De sorte que ma vie « normale » est organisée sans enfants ni petits-enfants, ce qui est bien différent du temps où j’élevais les miens. Ceci m’a permis de reconnaître que cette vie « normale » est tout de même très appréciée : j’ai le plein contrôle sur mon environnement, mon temps et mes activités, comme quelque chose auquel j’ai maintenant droit après avoir passé près d’une trentaine d’années à m’occuper de ma famille. La vie, ce n’est pas seulement les enfants. Je verrais mal me sentir coupable de cette vie « normale ». De plus, je n’ai plus à avoir peur; mes enfants me paraissent bien enracinés dans la vie. Mieux vaut apprécier tout cela plutôt que d’entretenir peur et culpabilité, deux émotions toxiques souvent présentes dans les familles. Et je me sens ainsi un meilleur grand-père parce que heureux et fier d’avoir accompli quelque chose de grandiose et d’achevé.

Être un grand-père heureux, sans peur ni culpabilité me rend plus proche de mes enfants et petits-enfants. C’est plus facile ainsi d’être moi-même, sans me sentir obligé de jouer le rôle de grand-père, ni celui de père pour mes deux filles. Je suis une personne retraitée qui a une personnalité, une certaine expérience, des valeurs, des idées, des projets, et c’est ce qui m’incombe d’assumer, que ce soit devant mes enfants ou mes petits-enfants. Ce qui m’a ramené à cette réflexion au sujet des rôles dans les familles.

J’ai souvent observé que les rôles prennent parfois plus d’importance que les personnes elles-mêmes. Cela se manifeste notamment à travers le langage, comme par exemple : « Viens! Maman va t’habiller – Papa va t’aider à faire tes devoirs. » Tous ces énoncés à la « troisième personne » au lieu du « Je » portent un rôle. N’ayez craintes. Vos enfants n’en seront pas traumatisés. Je le mentionne surtout pour votre propre confort dans les relations familiales. Moi, je me sentais plus moi-même quand je m’adressais à mes enfants au « Je ».  Je vous invite à cette réflexion concernant votre façon de vous exprimer à vos enfants et comment ça résonne à l’intérieur. Est-ce que ça résonne comme un rôle ou comme une interaction d’égal à égal entre deux personnes, c’est-à-dire sans rôle, de personne à personne.


Selon mon expérience, les enfants se sentent moins infantilisés et plus valorisés quand on leur parle d’égal à égal, et ce, à tout âge. Parce qu’eux aussi peuvent tomber dans un rôle en réponse au rôle du parent : petite victime, petit roi, petit casse-tout, etc.


Dans cet ordre d’idées, reconnaissons que nous sommes d’abord des personnes qui, comme déjà mentionné, avons une personnalité, une certaine expérience, des valeurs, des idées, des projets, tout ça à assumer. Ensuite, nous sommes hommes ou femmes en couple, avec tout ce que cela implique comme défi. Ensuite seulement, nous sommes parents, non pas comme rôle mais comme responsables d’accompagner des enfants pour qu’ils prennent pied dans la Vie.

Assumer une responsabilité me paraît plus concret et plus simple que de jouer un rôle, lequel est généralement associé à une image ou un modèle plus ou moins arbitraire. Ce qui suscite de grands et troublants questionnements du genre : « Suis-je une bonne mère ou un bon père? » La plupart du temps, les enfants qui détectent ce genre de questionnements y découvrent tout un jeu de manipulations leur garantissant le pouvoir sur leurs parents.


Quoi de plus vulnérable qu’un parent qui accorde toute sa valeur à un rôle arbitraire plutôt qu’à sa propre personne? Si je viens mêler des rôles de Papa et Maman dans mon couple et/ou dans ma propre personne, il se peut que je perde contact avec mon couple et avec moi-même, ce qui risque de brouiller la dynamique familiale.


Les enfants manipulateurs n’existent pas avec des parents authentiques. Ils bénéficient plutôt de précieuses références car ils ont toujours « l’heure juste ».

J’ai réalisé également que mes enfants sont aussi mes amis, d’égal à égal. Ils ont leur personnalité, leur expérience, leurs valeurs, leurs idées, leurs projets, et sont tout aussi débrouillards et énergiques que je l’étais à leur âge. Mon plaisir de parent est la satisfaction d’avoir contribué bien humblement au « grand cycle de la Vie », non pas en jouant un rôle mais en ayant été simplement moi-même tout en faisant mon possible.

Grand-Papa Pierre.

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