28 janvier 2025
Les communications familiales : Juger ou comprendre ? – Selon Grand-Papa PierreOn est tous d’accord : c’est dans la famille que chaque être humain fait ses premières expériences de communications, avec ses semblables et avec son environnement. Et quand on parle de communications dans la famille, c’est majeur! Cela concerne une foule d’enjeux entremêlés: amour, intimité, affection, émotions, langage, accompagnement, moralité, apprentissage, multi-générations, corrections, discipline, hygiène, alimentation, santé, études, travail, tenues vestimentaires, partage des tâches et des biens, amis, pressions sociales, etc.
Ajoutons à cela la réalité des parents, souvent nouvellement en couple, avec leur personnalité et leurs valeurs respectives, qui doivent s’accorder sur les façons de gérer la maisonnée, ainsi que sur les meilleurs principes d’éducation de leur progéniture. Aussi, ils travaillent souvent très fort pour gagner des sous, tout en cherchant à simplement se donner un peu de temps de ressourcement, en couple et individuellement.
Ajoutons à cela des enfants qui arrivent trop tôt, qui grandissent trop vite et qui ne cessent de nous remettre en question. Heureusement, ce ne sont pas les ressources qui manquent mais qui nécessitent tout de même de faire ce qu’il faut pour s’y retrouver…
Voilà donc un beau défi : mener à bon port ce projet de famille qui prend forme au fil des ans, poussé par la croissance de chacun de ses membres.
On comprend que, pour un déploiement harmonieux de tout ce bouillonnement, savoir communiquer, c’est sérieux; d’une part en raison de l’envergure de tous les enjeux qui en font partie, et, d’autre part, pour les effets à long terme sur le bonheur de chacun! Bien sûr, il ne s’agit pas de dramatiser cette réalité importante du rôle parental; mais ça vaut sûrement la peine de réfléchir sur ce que signifie ‘’savoir communiquer’’.
Reconnaissons que, dans le ‘’feu de l’action’’, c’est-à-dire, dans la tourmente d’une dynamique familiale telle que pressentie précédemment, les parents sont le plus souvent en mode réactif devant la perception de ce qui est grave ou urgent. Or, le mode réactif vise à régler une situation rapidement, sans se donner la peine de vraiment comprendre ce que vit la personne. Le réflexe de jugement (paresseux, irresponsable, incompétent, égoïste, naïf, borné, têtu, etc.) accompagne naturellement le mode réactif pour circonscrire le ‘’problème’’ en lui donnant une vision simpliste et passer à autre chose. Par exemple, un problème de difficulté scolaire, c’est parce que l’enfant est paresseux. Il ne prête pas ses jouets, c’est parce qu’il est égoïste.
Le mode réactif, avec le jugement qui l’accompagne, maintient une intensité émotive réfractaire à savoir ce qui se passe réellement. Le présent texte suggère donc l’importance d’une pause, d’un recueillement, de prendre une distance, pour créer une sorte d’ancrage afin de s’ouvrir à la perspective de ce que signifie ‘’savoir communiquer’’.
D’abord, mon attitude de base en tant que parent doit refléter l’une des conditions primordiales pour une véritable communication : bonne foi et bonté. Cela se manifeste alors par ce regard bienveillant envers chaque membre de la famille, incluant soi-même. En plus, l’exemple de la bonté et de la bonne foi est particulièrement contagieux et inspire toute la dynamique familiale, ce qui est tout à fait applicable à ce qui suit…
On se rappelle que chaque personne, parents et enfants, est unique par son tempérament, ses intérêts, ses talents physiques et intellectuels, ainsi que son intelligence cognitive et émotive. Sur cette base, chacun a droit à son unicité et doit être respecté comme tel, ce qui s’applique à toi aussi, cher lecteur. Je ne suis pas le premier ni le seul à faire cet énoncé reconnu d’emblée. En fait, quand chacun se sent reconnu et respecté dans cette unicité, c’est ainsi qu’il sera le mieux disposé pour bien communiquer.
Cependant, que ce soit à partir de nos propres familles ou de la mentalité de notre société, nos regards sont, depuis longtemps pollués de jugements et d’étiquettes. C’est comme une seconde nature : on se sent jugé et on juge les autres, comme quelque chose de normal dans nos interactions avec les autres; comme si ce n’est pas ‘’naturel’’ de saisir ce qui nous entoure sans ce petit qualificatif d’évaluation. Face à l’autre ou à une situation, on a souvent le réflexe de prendre position, en prononçant un jugement au lieu de simplement voir ce qui est.
Facilité oblige! Tout nous incite au plus facile et c’est même ‘’cool’’ de faire avec facilité les tâches qui nous incombent. Notre société de consommation l’a bien compris et c’est le plus souvent sur cet argument qu’ils font leurs publicités. Or, voilà qu’il est beaucoup plus facile de juger que de comprendre une difficulté ou un comportement chez l’autre. En plus, cela donne à celui qui juge une impression de supériorité, lui qui sait! Le prix de cette facilité est lourd : il crée une distance entre moi et l’autre, rendant la véritable communication pratiquement impossible, empoisonnée qu’elle est d’ignorance, de peur, de culpabilité, de rancœur autant par celui qui juge que par celui qui est jugé.
Et le pire : un jugement ne décrit pas la réalité, il ne décrit rien de plus qu’un jugement, subjectif. Or, savoir communiquer se base sur la réalité bien concrète : les faits, les besoins et les émotions de ceux qui sont en cause dans une situation donnée.
Heureusement, les techniques de communications classiques, notamment, le messages-je, l’écoute active et la résolution de conflits sont justement conçues pour mettre au jour la réalité bien concrète de chacun. Bien sûr, celui qui envisage de recourir à ces techniques de communications classiques devra s’assurer que son attitude reflète la bonté et la bonne foi, sinon, il tombera dans la facilité et l’impasse des jugements.
Tous ces êtres ‘’uniques’’ qui grandissent et vivent ensemble dans une merveilleuse dynamique familiale seront inévitablement confrontés dans leurs besoins, leurs émergences, leurs valeurs, leurs explorations, leurs émotions. Si tout cela se passe dans un milieu où règne le savoir communiquer, épuré de tout jugement, où on se donne la peine de comprendre ce que chacun vit dans cette famille, ils en sortiront probablement avec une véritable estime de soi, ainsi que la capacité d’apprécier l’unicité de tous ceux de leur entourage. Le savoir communiquer a quelque chose de contagieux, et c’est pour le mieux…
Grand-Papa Pierre.