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15 mars 2023

Responsabiliser son enfant. Ce qu’en pense Grand-Papa Pierre.

Voilà bien une préoccupation importante dans la plupart des familles. Responsabiliser: le dictionnaire parle de l’action de rendre responsable… Pour plusieurs, rendre l’enfant responsable fait partie des tâches éducatives envers cet enfant qui, par la nature de son jeune âge et de son manque d’expérience, vit dans l’insouciance, dégagé de toutes responsabilités, lesquelles sont assurées pour le temps nécessaire, par la bienveillance et (surtout) la patience de ses parents.

Et qu’est-ce que ça veut dire, au juste, rendre responsable? À première vue, on peut imaginer qu’un enfant responsable aurait, par exemple, les qualités suivantes : il serait plus autonome à s’habiller convenablement, même en hiver; plus motivé pour ses études avec de bons résultats scolaires à l’appui; mieux disposé à contribuer aux tâches ménagères; ou encore discipliné à ne pas abuser du temps passé sur les réseaux sociaux et les jeux vidéo, considérant que ça peut être néfaste pour sa santé; motivé à appliquer les principes de base de l’hygiène et d’une alimentation saine; plus judicieux dans le choix de ses amis; discipliné à garder sa chambre propre; respectueux envers les adultes et particulièrement ses parents. Etc. Sûrement le souhait de bien des parents…

À plus long terme, on pense à un adulte responsable comme ayant la capacité de fonctionner « correctement » dans la société, c’est-à-dire, qu’il agirait avec confiance, de son propre chef, pour obtenir et garder un bon emploi, pour avoir des amis, une relation de couple épanouissante, ainsi que les moyens nécessaires pour être bien adapté et même engagé dans notre société. Bref, les avantages associés à la responsabilisation semblent évidents, même dès la tendre enfance. Et avec raison.

De voir un enfant qui agit de façon responsable est habituellement rassurant pour son avenir. On comprend que plusieurs parents acceptent de bonne grâce cette mission comme faisant partie de leur rôle parental.

Et pourtant, rendre un enfant responsable semble présenter certaines difficultés à entendre les commentaires de certains parents, ainsi que les nombreux comportements « irresponsables » des jeunes. Et toi, comment t’y prends-tu pour responsabiliser ton enfant? Le sujet vaut la peine qu’on y réfléchisse.

Pour supporter cette réflexion, voici quelques idées de mon expérience et de mes observations. Reconnaissons cependant que ce n’est pas à moi de te dire comment responsabiliser ton enfant puisque, pour être cohérent avec la définition même de responsabilité, je considère que c’est ta responsabilité de parent. Je ne peux que donner des idées. D’ailleurs, j’ai appris, en tant que grand-père, que je ne peux pas empiéter sur la responsabilité de mes propres enfants en leur disant comment élever leurs enfants.  Ils veulent faire l’expérience de leur propre responsabilité de parent! Il y a un sens d’appartenance dans ce mot… et c’est ce qui lui confère toute sa valeur et sa motivation.

De plus, on a sûrement déjà porté à ton attention les mots inclus dans « responsabilité ». Dans sa version anglophone, on y retrouve explicitement : « response ability », soit la capacité à répondre adéquatement aux conditions de ton environnement dans une situation donnée; on parle d’une situation qui te concerne personnellement, sur la base de tes valeurs et de ta perception, ainsi que sur les conséquences de ton implication.

J’ajouterais que l’être humain a naturellement en lui-même toutes les capacités pour mettre en œuvre son sens de responsabilité et agir en conséquence en autant qu’il se sent personnellement concerné, interpelé, valorisé. Instinctivement, il en va de son bonheur car c’est avec ces capacités qu’il pourra s’enraciner dans une vie qui lui ressemble. Une personne heureuse est d’abord une personne responsable.

Combien de jeunes ne se sentent pas personnellement concernés par leurs études ou par leur santé ou par leur contribution aux tâches ménagères? Quelle serait la relation parent-enfant qui permettrait d’accompagner le jeune et de l’informer de façon bienveillante sur ce qui le concerne en lien avec ses résultats scolaires, sa propre santé, sur les effets bénéfiques d’une maison bien entretenue, etc.? À toi de définir ce genre de relation… sans morale, ni culpabilité; seulement des faits, incluant une rétroaction empathique sur les conséquences des agissements de ce jeune qui découvre la Vie.

J’ai souvent remarqué que certains parents gardent une perception infantilisante de leur enfant : ils aiment le voir petit, « cute »; ils ont même de l’attachement à son état irresponsable puisque cela leur confère un certain contrôle et valorise leur rôle de parent. Ils sont un peu embêtés, un jour, de voir leur jeune résister à ce contrôle, alors que ce n’est rien d’autre que le besoin de responsabilité qui émerge chez l’enfant. C’est le temps de délaisser l’infantilisation…qui, d’ailleurs n’a jamais rien apporté de bon à l’enfant. Au parent de déceler, par sa présence auprès de l’enfant, les signes de l’émergence de ses capacités responsables qui apparaissent souvent plus tôt qu’on pense…

Il y a la responsabilisation « forcée » qui ressemble à des conditionnements mis en œuvre, souvent, par des incitatifs, des punitions, des récompenses, ainsi que des propos culpabilisants envers celui qui « ne prend pas ses responsabilités », alors que le parent s’attend à ce que l’enfant agisse selon sa propre vision de parent, sans écoute réelle de ce que vit l’enfant. On comprend alors que l’initiative propre à l’enfant n’est ni considérée ni appréciée puisque les comportements souhaités sont essentiellement commandés par une sorte d’autorité extérieure. La motivation est absente et le sens de responsabilité prend plutôt l’allure d’une résistance.

Par contre, la responsabilisation en mode d’accompagnement bienveillant se fait sur la base d’une présence réelle de la part du parent; celui-ci se donne la peine de s’impliquer auprès de l’enfant en l’informant des faits et des valeurs qui donneront un sens à cet accompagnement.

En fait, ce qui anime une responsabilisation, c’est l’implication même de la personne responsable. Un parent qui s’implique auprès de son enfant donne l’exemple concret d’un parent responsable qui veut le bonheur de son enfant; celui-ci se sentira alors concerné, interpelé dans cet accompagnement, ce qui ne manquera pas de mettre en œuvre ses capacités inhérentes de responsabilisation.

Prenons l’exemple rayonnant du parent qui s’implique en s’intéressant sincèrement aux activités scolaires de son enfant. L’exemple rayonnant du parent qui s’implique est de mise; à toi de manifester auprès de ton enfant de la curiosité sur ce qu’il apprend à l’école, les matières qu’il préfère et celles qu’il aime moins, ainsi que ses difficultés, etc. Ces échanges d’aide et d’intérêts constituent un terrain propice de bienveillance pour nourrir la relation et rendre les activités scolaires significatives et ouvertes à la responsabilisation. Par contre, il est important de reconnaître que, dans cet accompagnement, les résultats scolaires relèvent de l’entière responsabilité de l’enfant puisque c’est lui qui devra composer avec les conséquences bonnes ou mauvaises qui en résultent.

Toutes ces expériences de responsabilisation faites en accompagnement bienveillant permettront à l’enfant d’agir sur la base de son for intérieur et de son estime de lui-même qui sont, en fait la source de son propre sens de responsabilité. Rappelons-nous qu’un sens de responsabilité élevé procure une qualité vie dans la même mesure, pour soi-même et pour notre environnement.

 

Grand-Papa Pierre,

À chacun sa responsabilité.

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